C’est non sans une certaine fierté que Juliette a accepté que je la photographie dans son quotidien, et surtout dans son potager. Après avoir connu la guerre mais aussi un grand amour parti bien trop tôt, c’est par choix qu’elle reste seule dans sa maison, dans une campagne bretonne assez isolée. A 93 ans, tout ce qu’elle demande c’est de pouvoir cultiver sa terre :
« Tant que je pourrai entretenir mon jardin ... » Et c’est avec passion qu’elle me présente son jardin, d’une propreté impressionnante. C’est qu'elle y accorde beaucoup de soin malgré le poids des ans qui courbe son dos et handicape ses mains. Puis, à petits pas, elle retourne vers sa maison. Elle y rencontre avec joie pour la première fois, l’un de ses derniers arrières petits-fils. On est en pleine préparation du repas de Pâques. Elle accepte le coup de main des ses petits- enfants, sans oublier de donner ses directives, avec une certaine espièglerie dans le regard, et un sourire en coin : elle sait bien qu’elle arrivera toujours à avoir le dernier mot. A table, c’est l’occasion d’évoquer ses souvenirs, et les anecdotes truculentes qu’elle raconte d’un air malicieux.
L’année suivante, et sans que je puisse la revoir, Juliette nous a quitté, pour rejoindre son grand amour. Elle est parti paisiblement, dans sa maison, comme elle le souhaitait. Un matin, le temps s'arrête et les objets du quotidien deviennent les vestiges d'une vie, les témoins de l'absence.

La photographie est une mémoire et ce reportage est un hommage à la vie et son impermanence, un hommage à une force de caractère, à des valeurs simples mais primordiales qu’il faut transmettre aux nouvelles générations.
C’est un hommage à cette femme en particulier, Juliette, ma grand-mère.

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